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Nexans Maroc : Karim Bennis raconte ses 37 ans de boîte

Après 37 ans de service, Karim Bennis quitte Nexans Maroc et c'est Selma Alami qui lui succède à la direction générale. Son départ à la retraite ne marque cependant pas l’arrêt de son parcours professionnel. Bien au contraire. Sa longue expérience, il compte la mettre au service de toutes les organisations industrielles ou commerciales du pays. Il a créé, à cet effet, COPERFE, une société de conseils pour la performance dont Nexans Maroc est le premier client. Il partage avec les lecteurs du «Matin», les principaux événements qui ont jalonné ses nombreuses années à la tête de la filiale marocaine du groupe français.

Nexans Maroc : Karim Bennis raconte ses 37 ans de boîte
Ph. Sradni


Le Matin : Après 37 ans de carrière chez Nexans Maroc, avez-vous le sentiment du devoir accompli ?

Karim Bennis : Oui, totalement. Je suis très satisfait de la progression du groupe aussi bien au Maroc qu'en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale. Aujourd’hui, Nexans Maroc compte un effectif de 800 collaborateurs sur l’ensemble de la région. Nous avons fait progresser l’entreprise. Quand je suis arrivé, le chiffre d’affaires était de 600 millions de DH, en 2021 il est monté à près de 2 milliards. Je suis donc très satisfait.

Quelles sont vos plus grandes réalisations pendant ces 37 ans ?

Il faut diviser les plus grandes réalisations en deux phases. Nous avons eu une première phase qui était la période du démantèlement douanier. L'entreprise est passée d'une situation de protection douanière avec des taux de protection de 40% à un démantèlement avec un taux de douane de zéro, donc ouvert totalement à la concurrence internationale. Cette première phase nous a permis de maintenir notre leadership sur le marché marocain, de le défendre et de le garder jusqu'à aujourd'hui. Ensuite, la seconde phase a été celle du développement, durant laquelle plusieurs grands projets ont été réalisés. Le premier projet, l'un des plus grands, a été la création d'une activité aéronautique pour les constructeurs Airbus et Boeing. Cette industrie a placé le Maroc parmi les quatre ou cinq pays dans le monde à fabriquer ce type de produits.

Notre deuxième réalisation est relative à la construction de la ligne à grande vitesse Casablanca-Tanger : Al Boraq. Dans le cadre du marché de la compensation industrielle signé avec le gouvernement marocain, il a fallu construire en JV avec le groupe Alstom une usine de production de câbles et d’armoires électriques pour les trains à grande vitesse. L’usine que nous avons installée à cet effet à Fès se développe formidablement aujourd’hui.

Notre troisième grande réussite, c'est le développement en Afrique. Au départ, Nexans ne faisait pas d'exportations. Aujourd’hui, l’export représente 45% de son activité. Il ne faut pas oublier non plus la création des unités industrielles en Côte d'Ivoire, la prise de participation dans Les Câbleries du Sénégal et la création de la société de distribution Sirmel Sénégal à Dakar.
L’une de mes grandes réalisations, dont je suis particulièrement fier, est d’avoir confié, avec la validation du groupe Nexans, à Selma Alami, une femme marocaine, la direction générale de Nexans Maroc et de la région nord et ouest-africaine. C’est une femme d'une grande compétence, d'une grande intégrité et d'un grand engagement qui va, je suis certain, contribuer à l'essor et au développement de l'entreprise.

Y a-t-il des choses qui auraient pu être faites autrement durant votre long parcours au sein de l'entreprise ?

Pendant les années 2004-2005, nous avions lancé une activité de câbles automobiles que nous avons arrêtée cinq ou six ans après. À l'époque, le marché était en train de changer totalement. Il fallait devenir un acteur mondial dans cette industrie de l'automobile. Nous étions quelques acteurs à opérer sur le marché local. Les clients, eux, les grands constructeurs automobiles, exigeaient de chaque industriel de pouvoir livrer le même produit à travers toutes leurs usines dans le monde. À cette époque, nous n'avions pas toute l'organisation logistique et même industrielle qui nous aurait permis de livrer dans l'ensemble des régions du monde. Nous n’avions pas vu que le marché était en train de changer.

Globalement, comment étaient vos rapports avec la maison-mère ?

Excellents. J'ai été le premier Marocain dans lequel le groupe Nexans a placé sa confiance pour diriger la filiale marocaine. On m’a confié, ensuite, la responsabilité de cette zone maghrébine et africaine, ce qui est une preuve de grande confiance. Bien sûr, je remercie tous les dirigeants du complexe qui m'ont apporté cette confiance et avec lesquels les relations ont toujours été bonnes.
Depuis, Nexans a énormément investi au Maroc, on a créé l’activité aéronautique, puis ferroviaire, sans oublier l'activité télécoms. Il y a donc également l'usine télécoms qui a été réalisée durant l'année 2021. Ce sont des preuves que les relations ont toujours été excellentes et que la confiance a toujours été au rendez-vous. La confiance en moi, mais également dans toutes les équipes Nexans Maroc et une forte reconnaissance du potentiel des ressources humaines marocaines, que ce soit la population ouvrière, population travailleuse et volontaire ou que ce soit la population des managers et cadres supérieurs, population compétente, engagée et d’un grand niveau n’ayant rien à envier aux managers européens ou ceux des pays occidentaux en général.

Comment voyez-vous Nexans Maroc dans 10 à 15 ans ?

Il n'y a aucune raison pour que Nexans Maroc ne continue pas à se développer dans les 10 ou 15 prochaines années. Surtout avec la confiance que place le groupe dans les équipes marocaines et dans le Maroc en général et tous les enjeux et challenges qui ont été identifiés. Bien sûr, ce développement se fera aussi bien au Maroc qu'en Afrique, en utilisant la compétitivité des usines marocaines pour prendre plus de parts de marché dans des pays européens ou autres. Bien sûr, il faut s’engager dès aujourd'hui dans les enjeux futurs comme l'industrie 4.0, la décarbonation, le développement des produits et de process, respectant les contraintes de protection de la planète et de décarbonisation, zéro émission de carbone à l’horizon 2030… Donc, avec tous ces enjeux, qui sont identifiés et qui, je suis persuadé, seront réussis, Nexans Maroc devrait continuer à progresser à une vitesse aussi forte que celle enregistrée au cours des 10 dernières années. Il n'y a pas de raison pour que cette croissance ne se perpétue pas.

Comment avez-vous vécu la crise de la Covid au sein du groupe ?

Cela était une période à la fois extrêmement difficile et extrêmement enrichissante. Difficile parce qu'il fallait gérer une très forte baisse de l’activité sur le marché marocain. Nous avions, grosso modo, une perte d'activité de l’ordre de 70% au moins pendant les quatre ou cinq premiers mois de la pandémie. Par contre, heureusement, comme expliqué auparavant, l’export représente 45% de l'activité globale. Cette partie de notre activité ne s’est absolument pas repliée. Donc, face à cette baisse de l'activité sur le marché marocain, nous avons des équipes qui sont restées extrêmement mobilisées de façon formidable, avec une organisation particulière du travail : nos équipes sont restées extraordinairement mobilisées avec une organisation, par télétravail, rigoureuse, avec des réunions de suivi et de contrôle chaque demi-journée de sorte à maintenir l’activité des usines et sauvegarder tous les emplois. La sauvegarde des emplois et des salaires était notre principal objectif. Je profite de cette occasion pour remercier toutes les équipes de production, les équipes commerciales, marketing, industrielles, financières et fonctions support pour leur sacrifice durant cette période et pour leur engagement. Je répète que bien qu’extrêmement compliquée, cette période était très intéressante à vivre avec l’ensemble des équipes, période et expérience que nous ne revivrons plus Incha Allah.

Avant la Covid, les délais de paiement de vos clients atteignaient 122 jours, qu’en est-il aujourd’hui ?

Nous avons vraiment été beaucoup plus sélectifs. Je pense que la période de la Covid a été bénéfique de ce côté-là. Pourquoi ? Parce que nous avons pris conscience, avec nos clients et fournisseurs, que si on voulait se sortir de cette période de crise, il fallait que tout le monde travaille sur ses délais de paiement. Un grand effort a donc été mis dans les méthodes de travail et dans la communication pour réduire ces délais. Aujourd'hui, ces derniers ont baissé pour se situer entre 92 et 93 jours. En soi, c’est une bonne chose pour l’entreprise et une très bonne réalisation dans l'intérêt de tout l’écosystème économique, pas seulement celui de Nexans Maroc. De manière plus globale, je suis certain qu'il y a une réelle prise de conscience par le tissu économique marocain de ces enjeux. Les opérateurs économiques savent que les délais de paiement ne peuvent plus rester au niveau où ils étaient avant et que les entreprises ne peuvent plus se permettre de payer leurs fournisseurs ou d'être payées avec des délais non maîtrisés.


Un commentaire sur le retrait, en 2021, de la Bourse de Casablanca des titres Nexans Maroc ?

Ce qu'on peut dire sur le retrait de la Bourse, c’est que l'action Nexans était très peu liquide puisque Nexans détenait 83% du capital et que sur la Bourse de Casablanca, l'action était très peu liquide. Par conséquent, Nexans n'avait pas besoin de cet apport de la Bourse pour financer son activité.

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Karim Bennis a créé son entreprise, premier client : Nexans Maroc

Elle s’appelle COPERFE. Elle est située à Casablanca et a démarré ses activités début février 2021. La société créée par Karim Bennis offre des services de conseils pour la performance aux industriels, mais également aux autres organisations purement commerciales tous secteurs confondus. «Dans l’activité Nexans Ouest-Africa, il y a des sociétés purement commerciales comme Sirmel, présente au Maroc et ailleurs, dont j’ai également assuré la présidence et la direction générale pendant un certain nombre d’années. Je connais donc bien aussi le métier de la distribution», nous révèle Bennis.

COPERF accompagne donc les entreprises pour leurs besoins de développement qu’il soit commercial ou marketing, «background» initial de Bennis, d’expansion industrielle, sur des problématiques financières comme la réduction des délais de paiement ou encore dans l’amélioration du working capital ou du free cash-flow en général. Son premier client, c’est bien évidemment... Nexans Maroc auprès de laquelle Bennis garde quelques missions. «Je reste administrateur de Nexans et des filiales marocaine et africaine. Je garde également le rôle de conseiller et le devoir de participer à son expansion au Maroc et en Afrique à travers la croissance externe», déclare au «Matin» le désormais ex-DG de Nexans Maroc.

Entretien réalisé par Abdelhafid Marzak
 

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