Les professionnels des stations-service se plaignent de voir le marché noir des carburants prospérer. Les récentes opérations menées par les éléments de la police judiciaire dans la région de l'Oriental, ayant conduit à l'arrestation de 18 individus pour leur implication présumée dans des actes de délinquance économique, de spéculation et de fraude aux carburants et à l'huile de moteur, ont en effet ravivé les appels à lutter contre les circuits clandestins de vente de carburants. Par la voix de la Fédération nationale des propriétaires, commerçants et gérants de stations-service (FNPCGSS), ces professionnels alertent sur «la prolifération d'intermédiaires et d'intrus qui s'activent sur ce marché parallèle et qui infligent de lourdes pertes à leur activité».
Le marché noir des carburants a une marge bénéficiaire quatre fois supérieure à celle du circuit formel
Contacté par «Le Matin», le président de la FNPCGSS, Jamal Zrikem, assure que sa Fédération avait déjà saisi les autorités de tutelle sur la pullulement d'intermédiaires et d'intrus actifs dans le marché noir des carburants, échappant aux circuits légaux de distribution et de vente, et réalisant une marge bénéficiaire quatre fois supérieure à celle dégagée par les professionnels des stations-service. «Ce circuit parallèle engendre d'énormes pertes pour les professionnels, déjà éprouvés par la baisse de leurs revenus et la forte pression fiscale, sans compter les pertes considérables pour le Trésor public, qui ne perçoit pas le moindre centime de cette activité souterraine», déplore le président de la FNPCGSS.
30% des ventes passent par le canal B to B, selon le Conseil de la concurrence
La Fédération, poursuit M. Zrikem, avait également mis en garde contre les usages dits « B to B », où de grandes sociétés de distribution, faisant fi des autorisations et des cahiers des charges, vendent directement du carburant à des particuliers et à des entreprises à des prix préférentiels, court-circuitant ainsi les canaux légaux.
Tout en se félicitant des dernières opérations menées par la DGSN pour lutter contre la vente de carburants hors des stations-service, le président de la FNPCGSS appelle à poursuivre et à étendre ces opérations à d'autres régions, vu que ce marché porte non seulement préjudice aux professionnels des stations-service, mais représente également une menace pour les citoyens en raison de la prolifération des entrepôts clandestins, lesquels n'obéissent pas aux normes de sécurité en vigueur et représentent de véritables bombes à retardement.
Rappelons que le Conseil de la concurrence, dans son avis n°A/3/22 (sur la flambée des prix des intrants et des matières premières au niveau mondial et ses conséquences sur le fonctionnement concurrentiel des marchés nationaux pour le cas des carburants, le gasoil et l'essence), avait souligné que les volumes de carburants vendus sur le marché national ont atteint en moyenne 6,6 millions de tonnes/an (environ 8,3 milliards de litres), soit une consommation d'environ 228 l/habitant/an. Ces ventes, souligne le Conseil, sont distribuées à hauteur de 70% via le canal des stations-service et 30% sur le canal B to B. Au nombre de ses recommandations visant à réformer le secteur et à établir des règles de bonne concurrence, le Conseil avait notamment préconisé de «revoir le cadre légal et réglementaire régissant les relations contractuelles entre les sociétés de distribution et les stations-service».
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