L’Association nationale des gestionnaires et formateurs des ressources humaines au Maroc (AGEF Nationale) a organisé, le 18 mai à Casablanca, une conférence-débat sur le thème «Talents marocains : quelles attentes et recommandations pour les entreprises ?» L’événement a été initié à l’occasion de la Journée internationale des ressources humaines, célébrée le 20 mai. «C’est une journée dont on ne parle pas beaucoup, mais qui mérite que les professionnels RH se mobilisent pour qu’elle marque les esprits au même titre que la journée internationale des droits de la femme», souligne Bouchra Nhaili, présidente de l’AGEF et DRH de Lydec.
Et d’ajouter que la conférence-débat a été également conçue dans le cadre de la nouvelle orientation stratégique de l’AGEF Nationale visant le renforcement des études et des enquêtes portant sur la fonction RH et son développement, particulièrement au Maroc. Effectivement, la rencontre du 18 mai a été l’occasion de partager avec les adhérents de l’AGEF les résultats de l’étude qui a été menée récemment par Rekrute.com et Boston Consulting Group. L’étude a été basée sur une enquête menée auprès de 90.000 talents dans 160 pays, dont près de 400 au Maroc.
Seulement 1% des collaborateurs fidèles à leurs employeurs, c’est alarmant !
«Le marché mondial de l’emploi est tendu et le Maroc n’échappe pas à la règle», souligne Alexandra Montant, DGA de Rekrute.com. Pis encore, précise-t-elle dans son allocution, les collaborateurs marocains sont devenus plus volatiles au Maroc que dans le monde. Chiffres à l’appui : 70% des profils marocains sont en recherche active d’emploi, contre 40% au niveau mondial. «Ce qu’il faut retenir aussi comme chiffre éloquent c’est que seulement 1% des collaborateurs se disent fidèles à leurs employeurs», alerte-t-elle. La spécialiste estime que les professionnels RH doivent affûter leurs armes et trouver des solutions pour attirer et surtout fidéliser les collaborateurs. Sur la même longueur d’onde, Zineb Sqalli, managing director & partner chez Boston Consulting Group, a attiré l’attention sur le fait qu’en matière d’attractivité des talents, la guerre est devenue mondiale.
Ceci a été favorisé, note-t-elle, par la transformation digitale. L’experte a tenu à souligner aussi que les talents marocains sont parmi les plus sollicités au monde, ce qui complique la mission pour les fonctions RH. «Plus de 80% des candidats marocains sont approchés plusieurs fois par an dont 41% sont approchés tous les mois, voire toutes les semaines», peut-on lire sur les résultats de l’étude. Face à ces constats, force est de reconnaître que les professionnels RH auront du pain sur la planche et qu’ils sont aujourd’hui, plus que jamais, dans la nécessité d’écouter et surtout de comprendre les véritables besoins des profils pour pouvoir y répondre. Sur ce volet, l’étude nous apprend que les salariés marocains placent le salaire en tête des facteurs décisifs pour considérer une offre d’emploi et que les aspirations tendent, de plus en plus, vers l’équilibre travail/vie personnelle avec la possibilité de s’épanouir sur le plan personnel et de faire une bonne carrière.
La reconnaissance en entreprise, c’est toujours important
Les intervenants lors du débat de l’AGEF ont mis l’accent sur la notion de reconnaissance au travail. «Il faut être réaliste, un talent a besoin d’être reconnu pour son travail», a souligné Omar Benaini, consultant associé du cabinet LMS ORH. Et d’ajouter que des efforts doivent être déployés par les RH pour qu’ils puissent retenir les talents, mais aussi et surtout éviter des phénomènes qu’on observe aujourd’hui comme le désengagement professionnel ou encore «la démission silencieuse». «Si nous n’améliorons pas l’approche RH au sein des entreprises, on risque de perdre les profils talentueux», a-t-il crié haut et fort. Ce même avis a été partagé par Essaid Bellal, PDG du Groupe Diorh. «Les talents sont des compétences qu’il convient de motiver et d’encourager, d’autant plus qu’ils peuvent être timides dans leur quotidien et dans leurs relations avec les autres», note l’expert.
Pas de talent sans engagement professionnel !
De son côté, Bouchra Nhaili a évoqué la notion de l’engagement qui demeure quasi importante aussi bien pour le développement de l’entreprise que pour la carrière du salarié lui-même. À cet effet, la présidente de l’AGEF est convaincue qu’un profil doté de plusieurs compétences, mais qui n’est pas engagé dans son travail n’aura pas de valeur ajoutée, ni pour lui, ni pour la performance de l’entreprise. L’experte a, dans ce sens, insisté sur la notion du management des talents. Ce type de management, a-t-elle rappelé, consiste à identifier les talents qui existent au sein de l’entreprise, mais aussi et surtout à connaître les talents qui émergent c’est-à-dire les profils qui ont besoin d’être accompagnés via des dispositifs RH pour qu’ils deviennent des talents au sein de l’entreprise.
Une précision d’une grande importance : L'entretien d'embauche est une étape décisive pour les Marocains. D’après l’enquête menée par BCG et ReKrute.com, 44% des candidats marocains seraient prêts à refuser une offre d’emploi de qualité en raison d’une expérience de recrutement négative, notamment en cas de questions discriminantes ou de mauvais contacts avec les recruteurs. Autant dire que les professionnels RH ont aujourd’hui du pain sur la planche en matière de gestion des talents au sein de l’entreprise dans un contexte mondialisé. «Ceci est complexe, mais ce n’est pas impossible», souligne Bouchra Nhaili qui a tenu à préciser dans son allocution que les DRH et les responsables RH sont aujourd’hui conscients de l’importance, mais aussi des enjeux de la démarche. Les experts ayant pris part à la rencontre ont, par ailleurs, tenu à souligner que ce sont les collaborateurs talentueux, motivés et engagés qui permettent à l’entreprise de réaliser ses objectifs voire les dépasser tout en assurant sa performance et sa pérennité, particulièrement dans un contexte difficile tel que celui que nous traversons aujourd’hui.
À noter que deux nouvelles études seront lancées par l'AGEF cette année. La première sera initiée en partenariat avec le cabinet LMS ORH et se focalisera sur la rémunération des dirigeants en période d’incertitude économique. La seconde sera réalisée en partenariat avec le cabinet Diorh et portera sur l’évolution et le développement de la fonction RH.
Lire aussi : L'AGEF débat des nouveautés RH de la Loi de finances 2023