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Le Data Driven au service du capital humain

La relance économique est imminente, sinon déjà entamée. C’est une période tellement difficile à gérer qu’il faudra impérativement piocher dans ses compétences managériales pour aboutir à un nouveau style susceptible de stimuler la créativité chez les collaborateurs et renforcer leur sentiment d’appartenance à l’entreprise. Quoi de plus instructif pour un manager RH que de connaître les besoins réels des collaborateurs surtout en temps de crise ! C’est là où le Data Driven appliqué au management RH trouve tout son sens. La démarche semble ambitieuse et prometteuse puisqu’elle permet au manager RH d’adopter un style basé sur la proximité et la confiance.

Le Data Driven  au service  du capital humain
Ph. Shutterstock

Sommes-nous en train d’assister à une véritable révolution de la fonction RH ? La crise sanitaire due à la pandémie du coronavirus (Covid-19) aura le mérite d’accélérer le déploiement à grande échelle de la transformation digitale, et par conséquent, la mise en place de nouveaux modes organisationnels tels que le télétravail ou le travail hybride. Dès lors, force est de reconnaître que les méthodes traditionnelles de management RH ne sont plus valables aujourd’hui. Que ce soit en termes d’administration du personnel ou de développement de carrière, les managers RH sont aujourd’hui dans l’obligation de repenser leur style de management pour pouvoir répondre à de nouveaux enjeux et surtout à de nouvelles attentes des collaborateurs, tout en capitalisant sur la transformation digitale. Que de défis à affronter ! Parmi les méthodes recommandées pour les relever figure celle dite «Data Driven». De façon générale, ce concept implique qu’un dirigeant d’entreprise s’appuie sur des données déterminées, entre autres, les préférences des clients, les motivations d’achats ou encore l’évolution de la concurrence pour pouvoir prendre des décisions stratégiques. Les données sont collectées grâce notamment aux interactions sur internet ou via des sondages réalisés auprès des clients.
Appliqué au management RH, le Data Driven trouve tout son intérêt puisqu’il permet d’assurer un management basé sur la proximité des collaborateurs. Comment ? Jihane Benslimane, consultante Business Strategy Europe-Afrique au sein d’Hera Consulting Group explique que «cette démarche permet à la direction en charge du capital humain de mieux détecter les sujets qui intéressent les collaborateurs ou les futures recrues, de comprendre en temps réel les attentes des employés et, par conséquent, de solidifier la marque employeur». Les données sont collectées grâce, entre autres, aux outils liés au marketing RH comme les sondages internes. En poussant la réflexion à son extrême, nous pouvons constater que le Data Driven appliqué au management RH peut être utilisé pour stimuler la créativité des équipes : Si on arrive à détecter les besoins réels des collaborateurs, on pourra mettre en place des actions pour y répondre, et c’est ainsi que l’on arrivera à gagner la confiance et surtout l’engagement des équipes. On aura ainsi beaucoup de chances à s’entourer de profils créatifs au lieu de bras cassés. C’est là tout l’enjeu du management de proximité dont les bienfaits ne sont plus à démontrer. La démarche paraît ambitieuse, mais elle n’est «malheureusement appliquée que dans une minorité d’entreprises marocaines», regrette Jihane Benlimane. 
Pis encore, ajoute-t-elle, «lorsque le concept de Data Driven est appliqué au management RH, les indicateurs ne sont pas optimisés ou analysés comme ils devraient l’être. Ceci dit, nous avons encore beaucoup de travail à faire pour le généraliser et assurer son bon déploiement au sein des entreprises».

L’engagement des collaborateurs, une obligation !
La réflexion sur la démarche du Data Driven appliqué au management RH est beaucoup plus profonde que l’on pourrait imaginer. «Il ne s’agit pas seulement de collecter et d’utiliser des données, mais aussi de les placer au centre du processus décisionnel et de les utiliser comme support de promotion d’équipe», tient à souligner Meryem Mazini, experte en communication et marque personnelle dans une déclaration accordée à «Management & Carrière». Pour elle, les données ne sont pas seulement un outil, c’est aussi un véritable enjeu de gestion. Toutefois, pour tirer profit de cette démarche, encore faut-il que certaines conditions soient réunies et à leur tête l’engagement de tous les collaborateurs. «Une entreprise ne pourra pas mettre en application le Data Driven sans engagement du capital humain», insiste Jihane Benslimane. En effet, explique-t-elle, les collaborateurs doivent s’investir pleinement pour tirer le meilleur des ressources, du système organisationnel et des données en vue d’aider la direction à prendre ses décisions. Parallèlement, ajoute l’experte, le succès de la démarche repose aussi sur le degré de la confiance établie entre les managers et les collaborateurs. D’ailleurs comme pour toute nouvelle stratégie, la mise en place du Data Driven requiert un changement de mindset et une ouverture d’esprit basée sur la confiance mutuelle qui, rappelons-le, se gagne. Ceci dit, «la gouvernance doit être complètement optimisée et les flux de communication doivent être fluides pour que cette confiance soit établie», recommande Jihane Benslimane qui ne manque pas de souligner dans ce sens que la transparence RH est plus qu’un impératif, notamment en temps de crise.
Autre astuce et non des moindres : Pour réussir le processus du Data Driven appliqué au management RH, il est important de recruter des experts en la matière. «Le succès de la démarche nécessite le recrutement, la formation ainsi que la fidélisation des talents spécialistes de la data», souligne Jihane Benslimane. En effet, chaque métier a ses spécificités et celui de la data ne déroge pas à la règle, car une culture des données nécessite bel et bien des compétences précises. Au vu de ce qui a été dit auparavant, nous constatons l’apport positif que peut constituer à l’entreprise le Data Driven appliqué au management RH. Il est donc grand temps de l’intégrer dans son processus décisionnel pour mieux relever les défis de la relance économique post-Covid-19. Managers, pensez-y sérieusement, ça sera votre cheval de bataille !  


Déclaration de Meryem Mazini, experte en communication et marque personnelle

«La transformation interne de l’entreprise a apporté de nouveaux défis : mettre l’humain au centre de l’attention, utiliser les données pour atteindre l’excellence opérationnelle et favoriser une culture Data Driven. Pour cette raison, il ne s’agit pas seulement de collecter et d’utiliser des données RH, mais aussi de les placer au centre du processus décisionnel et de les utiliser comme support de promotion d’équipe. Le rôle critique des données et la compréhension de l’équipe sur la performance de l’entreprise sont bien établis. Les données ne sont pas seulement un autre outil, c’est aussi un véritable enjeu de gestion. Il est donc nécessaire de changer la mentalité au sein de l’entreprise ; c’est un thème transversal pour toutes les fonctions de l’entreprise (des dirigeants, des ressources humaines, de la finance et de l’informatique). La communication et l’accès à l’information sont la clé pour encourager les employés à se responsabiliser et à s’entraider naturellement. La communication et la notification sont les principales clés : l’objectif premier de ce type de management est d’améliorer la communication avec les collaborateurs afin de leur fournir une information totalement transparente. Aujourd’hui, les entreprises marocaines sont contraintes d’utiliser une approche data pour améliorer le processus de gestion des données, mais aussi des ventes afin de l’appliquer à toutes les activités. Nous devançons à cet égard le comportement des clients finaux, en analysant leurs engagements, leurs besoins et leurs habitudes, afin de définir les objectifs à atteindre et d’augmenter le chiffre d’affaires.
Nous l’avons constaté lors de cette pandémie en étudiant cela à partir des changements dans les habitudes des consommateurs dans leur quotidien, par l’enseignement à distance, et aussi par la flambée de la consommation en ligne qui était, il y a quelques mois, quasi absente dans les ménages. Par conséquent, les professionnels intéressés peuvent soutenir les besoins de l’entreprise à ce changement en favorisant le développement de l’entreprise par le biais des experts pour les accompagner en développement de leur marque personnelle et en communication numérique dans les médias sociaux.»


Entretien avec Jihane Benslimane, consultante Business Strategy Europe-Afrique au sein d’Hera Consulting Group

«La démarche du Data Driven doit être considérée comme une opportunité de développement personnel et professionnel»

Management & Carrière : Le Data Driven appliqué au management RH fait partie des concepts qui ont le vent en poupe. De quoi s’agit-il au juste ? 
 Jihane Benslimane : Nous pouvons définir le Data Driven comme étant un concept qui permet aux dirigeants d’entreprises de mieux gérer leurs structures et de prendre des décisions stratégiques grâce, notamment à l’analyse des données dont ils disposent. Ce concept, comme vous l’avez si clairement souligné, a le vent en poupe. Sa mise en place a été accélérée grâce, entre autres, aux progrès réalisés dans les nouvelles technologies qui font en sorte que les managers peuvent aujourd’hui facilement disposer des informations et des données dont ils ont besoin pour prendre leurs décisions. D’ailleurs, grâce aux objets connectés, aux réseaux sociaux, aux smartphones, aux sites internet, nous pouvons rassembler un grand nombre de données sur les motivations d’achats, l’opinion des clients ou prospects, la satisfaction, la concurrence ou sur encore les collaborateurs ou les futurs recrues. Appliqué au management RH, ce concept trouve tout son intérêt puisqu’il permet à la direction en charge du capital humain de mieux détecter les sujets qui intéressent les collaborateurs ou les futures recrues, de comprendre en temps réel les attentes des employés et, par conséquent, de solidifier la marque employeur.

Plus concrètement, quels types de données sont-ils exploités pour favoriser l’expérience de l’employé grâce au Data Driven ? 
Depuis son premier jour dans l’entreprise jusqu’à la fin de son contrat, le collaborateur est témoin de plusieurs interactions qui constituent son expérience au sein de la structure. C’est ce qu’on appelle d’ailleurs l’expérience collaborateur. Toute entreprise qui se veut performante gagnerait à favoriser cette expérience, car, rappelons-le, les collaborateurs satisfaits peuvent devenir des ambassadeurs de leurs structures. Ceci dit, les entreprises doivent chercher à solidifier l’esprit d’appartenance et c’est là où le Data Driven trouve toute son importance. En effet, l’expérience collaborateur a un caractère subjectif. Pour pouvoir l’évaluer, il est important d’avoir des indicateurs de performance et d’objectiver le subjectif. Nous pouvons dans ce sens retenir trois types de facteurs RH à évaluer dans le Data Driven, à savoir : 
• Les données environnementales : Elles englobent le cadre de travail, l’environnement physique, l’outil digital, l’efficacité des processus dans l’organisation et la mise à disposition du matériel ou des équipements.
• Les critères relationnels qui incluent les interactions humaines dans le cadre du travail : Il s’agit, entre autres, de la fréquence et de la nature des événements organisés en interne, le degré de la bienveillance, les tensions, les habitudes managériales ou encore les perspectives d’évolution.
• Les indicateurs de performance : Ils sont liés à la nature du travail, le contenu de la mission, l’efficacité, les résultats et les objectifs obtenus.
Pour pouvoir évaluer régulièrement l’ensemble de ces facteurs, il est important de mettre en place des groupes restreints de collaborateurs, communément appelés «Focus Groups» et de continuer à proposer de nouveaux indicateurs pertinents. Il faut savoir que les sondages internes, les réseaux sociaux internes et le marketing RH peuvent permettre de collecter et d’alimenter les données quantitatives afin de prendre des décisions stratégiques.

Comment appliquer cette démarche au sein de l’entreprise ?
Avant de mettre en place une telle démarche, il faut d’abord penser à digitaliser les activités de l’entreprise et à mettre en place une stratégie interne. L’application de cette démarche passe par les étapes suivantes : 
• Déterminer un objectif global de la démarche stratégique du Data Driven.
• Faire appel aux experts-analystes internes et éventuellement des experts externes.
• Diagnostiquer l’environnement externe et identifier les données externes.
• Choisir l’outil d’implémentation et d’évaluation de la stratégie du Data Driven.
• Digitaliser et s’armer des nouvelles technologies efficaces.
• Assurer la transparence et la communication des données pour les destinataires concernés.
• Prendre des décisions en fonction des données.

Quels sont les ingrédients pour assurer le succès du Data Driven ? 
Dans un premier temps, il faut se tenir au courant des tendances autour des différents thèmes RH principaux comme : la valorisation des softs skills au détriment des compétences techniques ou encore la notion du bien-être au travail. Ensuite, il est important d’avoir un positionnement stratégique clair des ressources humaines et d’utiliser la digitalisation pour alléger les tâches administratives chronophages, répétitives et à faible valeur ajoutée. Puis, il est primordial de s’assurer que les outils utilisés permettent d’avoir une protection des données maximale. Enfin, il faut impérativement relever certaines données et analyser leur évolution comme : les actions de communication digitale, la collecte des données d’opinion, de mentalités ou de comportement et l’interprétation des données de l’environnement global digital.

Pourriez-vous nous parler des freins liés au Data Driven appliqué au management RH ? 
  Il faut d’abord rappeler que le premier pilier de ce concept repose sur la confiance entre les managers et les collaborateurs. La gouvernance doit donc être complètement optimisée pour que cette confiance soit établie et les flux de communications doivent être fluides. En l’absence de ces prérequis, le Data Driven appliqué au management RH ne donnera pas ses fruits et, par conséquent, les experts métiers ne pourront pas s’appuyer sur les données collectées pour prendre des décisions en toute sérénité. Dans un deuxième temps, je rappelle qu’une entreprise ne pourra pas mettre en application le Data Driven sans engagement de ses collaborateurs. Ceux-ci doivent s’investir pleinement pour tirer le meilleur des ressources, du système organisationnel et des données afin d’aider la direction et les équipes à prendre les décisions.
Je peux relever un frein supplémentaire que nous retrouvons d’ailleurs dans les différentes missions : l’absence de cohésion ou d’esprit d’équipe. En effet, tout le monde doit avoir le même objectif au sein de l’entreprise. C’est en décloisonnant et en développant la communication et la cohésion d’équipe entre les différents services que l’entreprise obtiendra de réels résultats. À mon sens, la démarche du Data Driven doit être considérée comme une opportunité de développement personnel et professionnel. Malheureusement, nous trouvons en entreprise beaucoup de résistance à ce changement.

Justement, peut-on affirmer que le Data Driven est un atout en temps de crise telle que celle liée à la Covid-19 ? 
La crise sanitaire résultant de la Covid-19 a permis à beaucoup d’entreprises marocaines ou administrations publiques de s’engager dans une transformation digitale en un temps record. Si nous souhaitons nous préparer au mieux à la relance économique, alors il semble primordial d’intégrer la culture de la data actuellement. Pour cela, il faut mobiliser et former les collaborateurs et les managers. Nous devons également établir et communiquer sur une stratégie claire avec des objectifs et des indicateurs de performance. En termes de management RH, les entreprises et les organisations doivent moderniser des procédures de recrutement et effectuer une veille dans le changement des mentalités et comportements. Je conseille les entreprises et les organisations de mettre en place ce concept à l’heure actuelle pour préparer une évolution croissante dans les prochaines années des résultats. Ceux-ci ne peuvent être positifs que s’ils sont accompagnés de communication interne, d’une marque employeur solide, de la présence de l’innovation et des nouvelles technologies, de développement des Softs Skills» et du Personnal Branding de chacun au sein de l’organisation. 

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