Menu
Search
Vendredi 12 Décembre 2025
S'abonner
close
Vendredi 12 Décembre 2025
Menu
Search

Tensions à la Chambre des représentants : un point d’ordre vire à l’affrontement

L’Hémicycle a été le théâtre d’une ambiance électrique lundi dernier. La séance des questions orales à la Chambre des représentants s’est transformée en joute verbale entre députés de la majorité et de l’opposition, sur fond de critiques persistantes visant l’absentéisme de certains membres du gouvernement. La tension a atteint son paroxysme lorsqu’un point d’ordre a dégénéré en incident parlementaire, poussant le groupe istiqlalien à réclamer l’ouverture d’une enquête contre le président de séance. Un nouvel affrontement symptomatique du climat de tension qui règne sous la coupole.

No Image
La session parlementaire printanière s’annonce des plus animées. Dans un climat où la tension est palpable, le bras de fer entre la majorité et l’opposition s’intensifie au fil des semaines. Ce rapport de force, désormais presque ritualisé, trouve sa scène favorite dans les séances de questions orales diffusées en direct, devenues ces derniers temps le théâtre d’affrontements verbaux, parfois aux frontières de l’incident. Lundi encore, la Chambre des représentants a été le théâtre d’un vif accrochage entre députés et président de séance, sur fond d’absentéisme ministériel.

Point d’ordre et coup d’éclat

Tout a démarré avec une intervention au ton incisif de Abdellah Chahid, président du groupe parlementaire socialiste (USFP, membre de l’opposition), qui a dénoncé frontalement l’absence récurrente de plusieurs membres du gouvernement, n’hésitant pas à en citer certains nommément. Dans un rappel à l’ordre institutionnel, M. Chahid a exigé que le bureau de la Chambre adresse une interpellation officielle à l’Exécutif afin de rappeler aux ministres leurs obligations de présence devant les parlementaires.

Riposte enflammée de la majorité

Mais la réplique n’a pas tardé. C’est Allal Amraoui, chef du groupe istiqlalien de l’unité et de l’égalité, qui est monté au créneau pour défendre les ministres absents, en particulier ceux de son propre parti politique. Fustigeant la lecture publique des noms, qu’il a qualifiée de «précédent dangereux», M. Amraoui a justifié certaines absences, notamment celle du secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur par des missions à l’étranger, tout en accusant la présidence de séance de «jeter de l’huile sur le feu» et de «semer la discorde».

Incident d’ampleur

S’en est suivi un incident parlementaire de grande ampleur. Rappelé à l’ordre par le président de séance, Mohamed Ouzzine, pour avoir enfreint le règlement intérieur, M. Amraoui a été aussitôt soutenu par El Ayachi El Farfar, député du même groupe (Istiqlal). Ce dernier a pris la parole sans autorisation. Un acte qui a provoqué un vacarme général, marqué par le hurlement du député El Farfar obligeant M. Ouzzine à hausser le ton : «Votre comportement est inacceptable. Élever la voix ne donne pas plus de poids à vos propos. Ce genre de parlementaires porte atteinte à la dignité de l’institution.»

Réactions en cascade

Cette déclaration, lancée en pleine séance retransmise en direct, a aussitôt déclenché un tollé. Mohamed Chawki, chef du groupe parlementaire du Rassemblement national des indépendants (RNI, parti de la majorité), a dénoncé un «deux poids, deux mesures» dans la gestion des points d’ordre entre majorité et opposition. Mustapha Baïtas, ministre chargé des Relations avec le Parlement, a tenté quant à lui de désamorcer la tension, affirmant que «chaque absence ministérielle est dûment justifiée» et que «le gouvernement reste profondément attaché à la régularité de sa présence dans l’Hémicycle». Après une vingtaine de minutes d’échanges houleux, les débats ont finalement repris, non sans les excuses protocolaires prononcées par Mohamed Ouzzine et El Ayachi El Farfar.

Réplique formelle du groupe istiqlalien

Mais l’affaire ne s’est pas arrêtée là. Le groupe istiqlalien de l’unité et de l’égalitarisme a saisi officiellement, tard dans la soirée, le président de la Chambre des représentants Rachid Talbi Alami, pour exiger l’ouverture d’une enquête et le renvoi de Mohamed Ouzzine devant la commission d’éthique parlementaire. Dans une lettre incendiaire, le parti de la balance a dénoncé «les propos indignes» du président de séance, jugés incompatibles avec la dignité de l'institution et assimilés à une «injure publique». Il a également accusé le président de la séance d’avoir abusé de sa position, «instrumentalisant la tribune présidentielle et la retransmission en direct pour lancer des insinuations inacceptables», notamment en laissant entendre que le député El Farfar aurait eu un comportement déplacé, une allégation que ce dernier dément catégoriquement.

Une escalade révélatrice

«Pour préserver la crédibilité de notre institution et l’honneur du député El Ferfar, nous demandons une enquête accélérée basée sur l’enregistrement intégral de la séance, ainsi que des sanctions appropriées, si les faits sont avérés», conclut la lettre. Ce nouvel épisode, en forme de tempête sous la coupole, illustre une montée de tension qui semble s’inscrire dans la durée. Alors que les lignes de fracture entre majorité et opposition s’approfondissent, la scène parlementaire marocaine s’apprête visiblement à vivre des semaines particulièrement animées. À l’approche d’échéances électorales majeures, cette escalade verbale laisse entrevoir une campagne future aux accents virulents, où les clashs risquent de s'étendre bien au-delà de l’enceinte du Parlement.
Lisez nos e-Papers