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Diplomatie marocaine, Sahara ... Entretien avec la députée Nadia Bouaïda

Dans un entretien exclusif accordé au «Matin», Nadia Bouaïda dresse le bilan à mi-parcours de son mandat en tant que présidente de la Commission des affaires étrangères, de la défense nationale, des affaires islamiques et des MRE à la Chambre des représentants. La députée RNI relève ainsi l’importance de la diplomatie parlementaire dans la défense de la question du Sahara marocain et les actions menées dans ce cadre pour expliquer la position du Maroc, ses fondements et les enjeux inhérents à ce conflit régional monté de toutes pièces. Mme Bouaïda évoque par ailleurs son engagement en faveur de la question de la femme et livre sa vision concernant la réforme de la Moudawana.

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Le Matin : À mi-parcours de votre mandat de députée et présidente de la Commission des affaires étrangères, quel bilan dressez-vous de votre action dans ce poste stratégique ?

Nadia Bouaïda :
Il n’est guère aisé d’établir un bilan à mi-parcours de mon mandat, car les objectifs que je me suis fixés en tant que parlementaire, ainsi que ceux qui me sont dévolus en tant que présidente de la Commission des Affaires étrangères, seront évalués à la fin de mon exercice. Toutefois, je reste confiante quant au caractère positif de ce bilan, au regard des résultats obtenus jusqu’à présent. En tant que parlementaire, je demeure attentive aux problématiques majeures préoccupant les citoyens, qu’ils aient placé leur confiance en moi et en le Rassemblement national des indépendants, qu’ils aient accordé leurs voix à d’autres formations politiques, ou qu’ils aient choisi l’abstention. Je fais remonter leurs préoccupations aux différents départements ministériels concernés, tout en cherchant des solutions aux problèmes que je suis en mesure de résoudre, que ce soit individuellement ou en collaboration avec d’autres membres du parti.

>>Lire aussi : La diplomatie marocaine imprime sa marque en Afrique

Concrètement, à mi-mandat, j’ai formulé plusieurs questions orales et des questions écrites à l’adresse des différents ministres, tout en assurant le suivi des dossiers auxquels j’ai consacré mon attention. Concernant mon mandat en tant que présidente de la Commission des affaires étrangères, à ce jour, j’ai pris part à plus de 40 activités diplomatiques de haut niveau. J’ai eu l’occasion de rencontrer et de discuter de divers dossiers communs avec des ambassadeurs et des ambassadrices de différents pays, notamment l’Italie, le Portugal, l’Allemagne, la Bulgarie, les Émirats arabes unis, le Kazakhstan, le Salvador, l’Australie et l’Union européenne. J’ai également échangé avec des représentants de Parlements étrangers sur les moyens de coopération entre nos institutions respectives, notamment avec l’Allemagne, le Salvador, les partis de l’opposition du Venezuela, et l’Union européenne.

J’ai eu l’honneur de représenter le Maroc dans plusieurs congrès et rencontres internationales portant sur la diplomatie parlementaire, ainsi que dans des forums abordant des problématiques communes intéressant le Maroc et le continent africain. Ces événements incluent par exemple ma participation en décembre 2021 aux travaux de l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée, ma présence à Accra au Forum sur les changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique en mars 2022, et ma participation à la 62e session extraordinaire du Forum des présidents et présidentes des Institutions législatives d’Amérique centrale, des Caraïbes et du Mexique-FOPREL. Ma mission consiste également à renforcer les liens d’amitié avec plusieurs Parlements à travers les groupes d’amitié parlementaire, notamment croate, français, et estonien.

Quels sont les principaux dossiers que vous avez eu à traiter ?

Il est délicat de hiérarchiser les dossiers que j’ai traités, car mes missions en tant que parlementaire et présidente de commission sont intrinsèquement liées à un objectif unique : servir mon pays, défendre ses intérêts, ainsi que ceux des citoyens que je représente. Il est important de souligner que j’ai grandi au sein d’une famille de diplomates, foncièrement sahraouie, ce qui me prédestine à assumer cette noble mission. Celle-ci s’inscrit dans la droite ligne de l’engagement constant de ma famille à répondre à l’appel de la patrie avec abnégation. Au cours de cette première partie de mon mandat, la coopération parlementaire a revêtu une importance particulière dans le cadre de mes activités en tant que présidente de la Commission. J’ai multiplié les rencontres avec les représentants des Parlements de plusieurs pays africains et européens, ainsi qu’avec des députés du Parlement européen. L’objectif était de renforcer les relations entre le Maroc et ces acteurs politiques, de faire converger les points de vue sur les questions d’intérêt commun et, surtout, d’accompagner la politique diplomatique marocaine dans ses efforts pour la défense de la cause du Sahara marocain. Ces rencontres ont également confirmé le rôle du Maroc en tant qu’acteur clé dans la construction de ponts de dialogue et de compréhension entre l’Afrique et l’Europe. Par ailleurs, une visite officielle en Autriche, organisée par l’association Moroccan Millennium Leaders, l’ambassade du Royaume du Maroc en Autriche et la Fondation Konrad Adenauer Stiftung, a marqué significativement mon parcours de parlementaire. Cet événement a facilité des échanges fructueux avec des représentants d’institutions autrichiennes de premier plan. Une conférence, en partenariat avec l’Académie diplomatique de Vienne, sous le thème «Coexistence among Civilisations : Successful models», a réuni des personnalités éminentes, dont André Azoulay, Conseiller de S.M. le Roi. Soulignant la singularité du modèle marocain de coexistence, basé sur les valeurs de paix et de vivre-ensemble, cette conférence a renforcé les liens entre le Maroc et l’Autriche, offrant une tribune précieuse pour promouvoir le dialogue civilisationnel et consolider les relations historiques entre les deux pays.

Comment percevez-vous le rôle de la diplomatie parlementaire ? Pensez-vous qu’elle soit suffisamment investie et valorisée par la Chambre des représentants ?

Je suis particulièrement fière du rôle que joue la Commission des affaires étrangères, que j’ai l’honneur de présider, dans le renforcement de la diplomatie marocaine, notamment en ce qui concerne la défense du dossier du Sahara marocain. En multipliant nos rencontres avec les représentants des Parlements des pays qui n’ont pas encore reconnu la marocanité du Sahara, nous œuvrons activement pour promouvoir la position et les intérêts du Maroc sur la scène internationale. Ces échanges, initiés par la commission, sont d’une importance cruciale pour sensibiliser la communauté internationale aux réalités et aux enjeux liés à cette question primordiale pour le Royaume. À travers ces rencontres, nous avons l’opportunité d’exposer les fondements historiques, juridiques et légitimes du Maroc dans la région, contribuant ainsi à dissiper d’éventuelles incompréhensions. Notre implication active dans ces discussions vise également à établir des relations solides avec les Parlements des pays concernés.

En favorisant un dialogue ouvert et constructif, nous cherchons à créer des coalitions parlementaires favorables à la position marocaine, une position légitime, juste et justifiée. Cela renforce notre capacité à défendre nos intérêts et à promouvoir notre vision sur la scène internationale.

Je tiens à souligner que la diplomatie parlementaire constitue un pilier essentiel de notre action au sein de la Commission des affaires étrangères. En continuant à m’investir dans ces efforts, moi ainsi que les autres membres de la Commission, je suis convaincue que nous renforçons l’influence du Maroc à l’échelle mondiale. Nous sommes déterminés à faire entendre la voix de notre pays et à défendre avec conviction nos droits et notre légitimité dans le dossier du Sahara. Cette mission n’est pas du tout aisée, toutefois nous arrivons à la mener à bien grâce aux efforts déployés par le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, qui ne ménage aucun effort et met à disposition les moyens pour accompagner et soutenir les travaux de notre Commission, ainsi que des autres Commissions parlementaires.

En vos qualités de représentants nationaux, êtes-vous impliqués par le département des Affaires étrangères dans les discussions concernant les enjeux stratégiques liés à la diplomatie marocaine ? En tant que représentants de la Nation, nous entretenons une collaboration étroite avec le ministère des Affaires étrangères, dans le strict respect de la séparation des pouvoirs entre le législatif et l’exécutif. Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, se distingue par son écoute attentive, sa volonté de partage d’informations et sa considération envers nos contributions. Notre coopération vise à promouvoir les intérêts supérieurs de notre nation, et nous sommes engagés dans un dialogue constructif pour faire primer les enjeux stratégiques liés à la diplomatie marocaine.

Lors de la récente conférence sur la coopération parlementaire africaine, l’idée de créer un «Forum des présidents des Commissions des affaires étrangères des Parlements africains» a été évoquée.

Où en est le processus de concrétisation de ce projet ?

L’émergence du Forum des présidents des Commissions des affaires étrangères en Afrique découle de la prise de conscience accrue de la complexité croissante des relations internationales et de leur impact déterminant sur le développement, la sécurité et la stabilité des nations africaines. Dans ce contexte, ce forum se positionne comme un cadre essentiel, réunissant les présidents des Commissions des affaires étrangères des Parlements africains. L’objectif premier de cette initiative est de créer un espace privilégié propice au dialogue et à la collaboration. Son ambition est d’aborder de manière approfondie les multiples défis et opportunités liés aux affaires étrangères, à la sécurité et au développement sur le continent africain. En favorisant la concertation entre les acteurs clés de ces domaines, le forum vise à renforcer la coopération interparlementaire et à élaborer des solutions concertées face aux enjeux communs.

La première réunion, tenue à la première Chambre en présence de 26 présidents de Commissions, a marqué un moment significatif de consensus et d’adhésion unanime autour de l’idée de créer ce Forum. L’accueil favorable de cette proposition témoigne de la reconnaissance par les différents acteurs de la nécessité d’une plateforme institutionnalisée permettant des échanges structurés et une coordination renforcée. Le processus de concrétisation de ce projet est actuellement en cours, avec une volonté partagée de mettre en place un cadre opérationnel et fonctionnel pour le Forum des présidents des Commissions des affaires étrangères en Afrique. Les prochaines étapes impliqueront des discussions approfondies sur la structure organisationnelle, les domaines prioritaires d’intervention et les mécanismes de coordination.

Des informations prêtent au Maroc la volonté d’abriter le siège de cette structure à Rabat. Que pourriez-vous nous dire à cet égard ?

Concernant les informations au sujet de l’accueil du siège du Forum des présidents des Commissions des Affaires étrangères en Afrique à Rabat, je tiens à préciser que cette question reste actuellement en cours de discussion. La décision concernant le siège sera formellement abordée lors du prochain Forum, prévu cette année. À ce stade, les préparatifs vont bon train pour assurer le bon déroulement de cet événement crucial. Les délibérations et les échanges au cours de ce Forum seront déterminants pour trancher cette question importante. Les participants auront l’opportunité de délibérer sur les divers aspects liés à l’installation du siège, en prenant en compte les avantages stratégiques, les conditions logistiques, et les implications pour la coopération interparlementaire en Afrique.

En quoi une présence active du Maroc dans ce Forum serait-elle bénéfique pour le Royaume ?

La création du Forum des présidents des Commissions des affaires étrangères en Afrique est porteuse de multiples avantages pour le Royaume du Maroc, tant sur le plan diplomatique que sur le plan stratégique. Tout d’abord, ce forum offre au Maroc une plateforme privilégiée pour renforcer ses liens avec les Parlements africains et consolider son rôle en tant qu’acteur majeur sur la scène continentale. En favorisant la coopération, le dialogue et la compréhension mutuelle, le Royaume pourra participer activement à l’identification et à la résolution des défis communs auxquels sont confrontés les pays africains sur la scène internationale. De plus, ce forum constitue une opportunité unique pour le Maroc de partager ses bonnes pratiques en matière de diplomatie parlementaire et de gouvernance dans le domaine des affaires étrangères. En tant que pays ayant une longue tradition diplomatique et un engagement actif dans les questions africaines, le Maroc peut jouer un rôle de men tor et contribuer à renforcer les capacités des autres Parlements du continent. Enfin, en encourageant une approche concertée et coordonnée des Parlements africains face aux enjeux mondiaux, le Royaume contribuera à promouvoir une représentation africaine unie et cohérente sur la scène internationale. Cette cohésion renforcée favorisera une prise de décision collective et à fort impact dans les domaines des affaires étrangères, consolidant ainsi la voix de l’Afrique sur la scène mondiale. En somme, la participation active du Maroc à ce forum représente une opportunité stratégique pour renforcer son leadership continental et contribuer à l’émergence d’une diplomatie parlementaire africaine unie et efficace.

Vous êtes engagée politiquement en tant que membre du RNI, vous présidez l’organisation féminine du parti dans la région de Guelmim-Oued Noun. Sur la révision du Code de la famille, quelles sont vos positions s’agissant de cette réforme sociétale primordiale ?

La révision du Code de la famille est d’une importance cruciale pour moi. En tant que femme militante, et de par mon engagement au sein du parti et de la société civile, je suis confrontée quotidiennement à la réalité des souffrances endurées par les femmes et les enfants. Je suis profondément convaincue que le développement et la prospérité d’une nation nécessitent pleinement l’implication active des femmes, une conviction partagée et ardemment défendue par le président du parti, Monsieur Aziz Akhannouch. Sa position forte en faveur des droits des femmes reste une source d’inspiration, même si l’implication des femmes demeure entravée par les défis auxquels elles font face pour défendre leurs droits et ceux de leurs enfants. Je suis fermement convaincue que l’égalité des sexes est essentielle, que ce soit dans les domaines économique, politique ou social. Aucune forme de marginalisation ne devrait exister, et il est impératif de placer l’enfant au centre de toutes les décisions. Dans cette optique, la révision du Code de la famille, la Modawana, doit prioriser l’intérêt supérieur de l’enfant, en instituant des mesures légis latives rigoureuses pour garantir sa protection. La loi doit être minutieusement élaborée, envisageant, le cas échéant, des barèmes pour le calcul des pensions alimentaires des enfants, dans le but de préserver le foyer familial comme un sanctuaire protecteur pour les enfants. Il est impératif de revoir certains articles de la loi actuelle, comme le cas où une femme, ayant la garde de son enfant, doit passer par le père pour inscrire l’enfant à l’école. Cette démarche, soumise aux aléas d’une réponse tardive ou au chantage, est contraire aux principes d’égalité et de responsabilité parentale. Bien que le Maroc ait accompli d’importants progrès au cours des deux dernières décennies en matière de droits des femmes, grâce à la vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, notre pays est aujourd’hui confronté à de nombreux défis et contraintes.

En tant que pilier fondamental du développement, la famille doit être au cœur de nos préoccupations et de nos réformes. Ces positions reflètent-elles la ligne officielle de votre formation politique ?

Les positions que j’ai exposées reflètent ma conviction personnelle et ne sont pas nécessairement celles du RNI. Cependant, il est important de souligner que le RNI demeure un parti politique qui accorde à la femme une considération égale à celle de l’homme. Au sein de notre formation politique, les femmes ont toujours occupé des postes importants et stratégiques, basés non pas sur le genre, mais sur leurs compétences et leurs capacités. La question de la révision de la Moudawana a fait l’objet de débats approfondis au sein du parti, avec des rencontres régionales, la création d’une commission de préparation et des discussions au sein du bureau politique. Ces propositions seront présentées lors du prochain sommet de la femme Rniste prévu en mars prochain à Marrakech. Il est à noter que ces démarches s’inscrivent dans le cadre du processus démocratique interne du parti, respectant les étapes nécessaires avant de présenter des positions officielles.
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