Le Maroc est assis sur un château de sable. Littéralement. Ses ressources naturelles, en particulier l’eau et les matériaux issus des carrières, s’érodent sous l’effet d’une exploitation parfois anarchique, souvent intensive. Le cri d’alarme vient cette fois du Conseil économique, social et environnemental, qui vient d’adopter un rapport sans concession sur les mécanismes d’autorisation et de contrôle d’exploitation de ces richesses. Le constat est sans appel : malgré l’existence d’un arsenal réglementaire, la gestion de ces ressources reste défaillante, hypothéquant l’avenir du Royaume.
Mais le rapport pointe aussi du doigt la lenteur de la machine administrative. Les schémas régionaux de gestion des carrières, prévus par la loi 27-13, n’ont toujours pas été publiés au Bulletin officiel. Un retard qui entrave la mise en œuvre effective de cette législation pourtant ambitieuse. «La multiplicité des intervenants ralentit considérablement la procédure d’ouverture des carrières de travaux publics, même pour des exploitations temporaires», déplorent les rédacteurs du rapport. Une situation qui peut «porter préjudice aux investisseurs et nuire à l’exécution des chantiers».
Dans le domaine de l’eau, le bilan n’est guère plus reluisant. Les plans directeurs d’aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE), bien qu’approuvés par les conseils d’administration des Agences de bassins hydrauliques, ne sont pas opposables faute d’adoption par décret. Un vide juridique qui fragilise la planification à long terme de cette ressource vitale.
L’environnement est la première victime de ces dérives. «La plupart des exploitants se contentent souvent d’abandonner les sites au terme de leur exploitation, sans effectuer de réaménagement ou en réalisant un réaménagement non conforme», s’alarme le rapport. Ces friches industrielles défigurent les paysages et sont sources de pollutions diverses.
Les conditions de travail ne sont pas épargnées. Dans certaines carrières, elles ne sont pas conformes «aux dispositions du Code du travail et aux principes de la responsabilité sociale de l’entreprise». Une situation d’autant plus préoccupante que les moyens de contrôle font cruellement défaut. Le CESE pointe «l’insuffisance patente des moyens humains et matériels dédiés à la surveillance et au contrôle réguliers des carrières».
Le rapport dissèque la répartition de ces recettes. L’extraction de matériaux de construction arrive en tête (40%), suivie par les prélèvements pour l’eau potable (22%), l’irrigation (19%) et la production hydroélectrique (9%). Mais un chiffre interpelle : la redevance sur les déversements d’eaux usées ne représente pas même 1% du total. «Les quantités déclarées sont faibles et les redevances associées dérisoires», relève le CESE. Cette situation n’incite guère à l’optimisme quant à la qualité des eaux marocaines. D’autant que la «police de l’eau», chargée des contrôles, peine à remplir sa mission. Son impact est «encore très limité», faute de ressources humaines suffisantes et de formation adéquate.
• Premier chantier : renforcer l’arsenal juridique. Il s’agit de conférer un caractère opposable aux Plans directeurs d’aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE), d’accélérer l’élaboration des schémas régionaux de gestion des carrières et d’adopter les textes d’application de la loi 49-17 sur l’évaluation environnementale.
• Deuxième priorité : responsabiliser les exploitants. Le rapport appelle à leur imposer «l’utilisation de méthodes, pratiques et technologies réduisant les impacts négatifs». Il insiste également sur la nécessité de renforcer les conditions de sécurité lors du transport des matériaux et d’exiger des rapports annuels sur la situation environnementale des sites.
La réhabilitation des carrières fait l’objet d’une attention particulière. Le CESE recommande de définir un «mode opératoire» précis, de s’inspirer des meilleures pratiques internationales et surtout d’obliger les exploitants à restaurer les lieux après usage. Enfin, le contrôle doit être renforcé, avec des sanctions dissuasives à la clé. L’objectif : garantir «la transparence, l’équité et l’égalité entre les soumissionnaires» tout au long du processus d’autorisation et d’exploitation.
Des lois sur le papier, des lacunes sur le terrain
«Entre 50 et 60% des matériaux extraits des carrières sont commercialisés de manière informelle». Cette statistique, avancée par le CESE, illustre à elle seule l’ampleur du problème. Graviers, sables : ces granulats, indispensables au secteur de la construction, échappent en grande partie au contrôle de l’État. Résultat : une concurrence déloyale s’installe, privant le Trésor et les collectivités territoriales de recettes substantielles.Mais le rapport pointe aussi du doigt la lenteur de la machine administrative. Les schémas régionaux de gestion des carrières, prévus par la loi 27-13, n’ont toujours pas été publiés au Bulletin officiel. Un retard qui entrave la mise en œuvre effective de cette législation pourtant ambitieuse. «La multiplicité des intervenants ralentit considérablement la procédure d’ouverture des carrières de travaux publics, même pour des exploitations temporaires», déplorent les rédacteurs du rapport. Une situation qui peut «porter préjudice aux investisseurs et nuire à l’exécution des chantiers».
Dans le domaine de l’eau, le bilan n’est guère plus reluisant. Les plans directeurs d’aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE), bien qu’approuvés par les conseils d’administration des Agences de bassins hydrauliques, ne sont pas opposables faute d’adoption par décret. Un vide juridique qui fragilise la planification à long terme de cette ressource vitale.
L’informel prospère, l’environnement subit
Au-delà des lacunes administratives, c’est bien l’ampleur du secteur informel qui inquiète le CESE. Dans le domaine des carrières, cette économie souterraine se manifeste par des sites non déclarés ou des exploitations autorisées mais pratiquant la fraude et la sous-déclaration. Les conséquences sont multiples : concurrence déloyale, manque à gagner fiscal, mais aussi «risques d’exploitation effrénée».L’environnement est la première victime de ces dérives. «La plupart des exploitants se contentent souvent d’abandonner les sites au terme de leur exploitation, sans effectuer de réaménagement ou en réalisant un réaménagement non conforme», s’alarme le rapport. Ces friches industrielles défigurent les paysages et sont sources de pollutions diverses.
Les conditions de travail ne sont pas épargnées. Dans certaines carrières, elles ne sont pas conformes «aux dispositions du Code du travail et aux principes de la responsabilité sociale de l’entreprise». Une situation d’autant plus préoccupante que les moyens de contrôle font cruellement défaut. Le CESE pointe «l’insuffisance patente des moyens humains et matériels dédiés à la surveillance et au contrôle réguliers des carrières».
Des redevances en eau trouble
La gestion de l’or bleu n’échappe pas aux critiques. Entre 2012 et 2017, les Agences de bassin hydraulique ont recouvré des montants annuels de redevances oscillant entre 187,86 et 186,62 millions de dirhams. Des sommes jugées insuffisantes «par rapport aux différentes utilisations du Domaine public hydraulique».Le rapport dissèque la répartition de ces recettes. L’extraction de matériaux de construction arrive en tête (40%), suivie par les prélèvements pour l’eau potable (22%), l’irrigation (19%) et la production hydroélectrique (9%). Mais un chiffre interpelle : la redevance sur les déversements d’eaux usées ne représente pas même 1% du total. «Les quantités déclarées sont faibles et les redevances associées dérisoires», relève le CESE. Cette situation n’incite guère à l’optimisme quant à la qualité des eaux marocaines. D’autant que la «police de l’eau», chargée des contrôles, peine à remplir sa mission. Son impact est «encore très limité», faute de ressources humaines suffisantes et de formation adéquate.
Recommandations : cap sur la durabilité
Face à ce sombre tableau, le CESE ne se contente pas de dresser un état des lieux. Il formule des recommandations, avec un maître-mot : durabilité. Pour y parvenir, le Conseil préconise d’agir sur plusieurs leviers.• Premier chantier : renforcer l’arsenal juridique. Il s’agit de conférer un caractère opposable aux Plans directeurs d’aménagement intégré des ressources en eau (PDAIRE), d’accélérer l’élaboration des schémas régionaux de gestion des carrières et d’adopter les textes d’application de la loi 49-17 sur l’évaluation environnementale.
• Deuxième priorité : responsabiliser les exploitants. Le rapport appelle à leur imposer «l’utilisation de méthodes, pratiques et technologies réduisant les impacts négatifs». Il insiste également sur la nécessité de renforcer les conditions de sécurité lors du transport des matériaux et d’exiger des rapports annuels sur la situation environnementale des sites.
La réhabilitation des carrières fait l’objet d’une attention particulière. Le CESE recommande de définir un «mode opératoire» précis, de s’inspirer des meilleures pratiques internationales et surtout d’obliger les exploitants à restaurer les lieux après usage. Enfin, le contrôle doit être renforcé, avec des sanctions dissuasives à la clé. L’objectif : garantir «la transparence, l’équité et l’égalité entre les soumissionnaires» tout au long du processus d’autorisation et d’exploitation.