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Marché du livre scolaire : l’analyse et les recommandations du Conseil de la concurrence

Dans un avis rendu public récemment, le Conseil de la concurrence estime que les manuels scolaires sont devenus un produit essentiellement commercial, constituant la première source de revenus des éditeurs et des libraires. Les difficultés financières des éditeurs, aggravées par l’augmentation des coûts des intrants, nécessitent, selon le Conseil, une réforme du modèle économique. Il y va selon lui de la viabilité à long terme du marché du livre scolaire.

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Dans le cadre d'une «saisine d'office», le Conseil de la concurrence vient de publier un avis intitulé «Avis sur le fonctionnement concurrentiel du marché du livre scolaire», qui porte à la fois sur le livre scolaire homologué et le livre scolaire parallèle. La préparation de cet avis a impliqué des auditions approfondies avec divers acteurs du marché du livre scolaire au Maroc, y compris les institutions publiques, les associations professionnelles, les fédérations de protection des consommateurs, ainsi que les principaux acteurs de la chaîne de valeur du marché (éditeurs, importateurs, imprimeurs, distributeurs, libraires).

>>Lire aussi : L'Alliance des Libraires dénonce la vente des manuels scolaires dans les écoles privées

Un modèle économique obsolète

Selon ce rapport, le modèle économique sous-tendant le marché du livre scolaire au Maroc est devenu inefficace et déconnecté des réalités économiques du pays. Ce marché repose sur une offre et une demande artificiellement soutenues par des financements publics et semi-publics. Cette désynchronisation avec le marché et l'économie réelle pose un sérieux problème, selon le document. Les manuels scolaires sont devenus un produit essentiellement commercial, constituant la première source de revenus des éditeurs et des libraires. La dépendance excessive aux fonds publics s'est accentuée récemment avec l'octroi de subventions par l'État pour réduire la hausse des prix de vente publics des manuels scolaires à seulement 25%. Cette situation reflète les difficultés financières des éditeurs, aggravées par l'augmentation des coûts des intrants, notamment une hausse de plus de 103% des prix du papier. Une réforme du modèle économique s'impose pour garantir la viabilité à long terme du marché du livre scolaire, souligne le rapport.

Manuels scolaires : qualité sacrifiée au profit de la quantité

Le rapport relève également que la production annuelle de manuels scolaires au Maroc oscille entre 25 et 30 millions d'exemplaires. Ces manuels, conçus pour être utilisés une seule fois, engendrent un gaspillage massif de ressources, de matières premières et d'énergie. Cette production de masse a eu des conséquences néfastes sur la qualité des manuels. Les droits d'auteur, récompensant la production intellectuelle du contenu de ces livres, ne représentent en moyenne que 8% du prix du livre scolaire. Les prix de ces manuels, fixés par l'État, n'ont pas été révisés depuis 2002-2008, et la procédure légale de fixation des prix n'a pas été respectée dans la majorité des cas. Par conséquent, la qualité du papier s'est dégradée, avec un grammage de plus en plus réduit, et les illustrations ne répondent plus aux standards attendus. Les manuels scolaires sont devenus peu attrayants pour les élèves, voire répulsifs pour certains, ce qui entrave leur apprentissage fondamental, déplore le Conseil dans son rapport.

Recentrer le modèle économique du marché des livres scolaires

Face à ces conclusions, il est évident que le marché du livre scolaire au Maroc traverse une crise profonde. Une réforme urgente s'impose pour garantir un accès équitable aux manuels scolaires tout en favorisant la qualité de l'éducation. Ainsi, dans son rapport, le Conseil de la concurrence a émis 9 recommandations majeures pour transformer le marché du livre scolaire. Il préconise de revoir le modèle économique en renforçant les logiques d’innovation et de créativité. Ce recentrage devrait être basé sur des logiques économiques qui encouragent la créativité et l'innovation, tout en prenant en compte les spécificités culturelles et sociétales du pays. Cela pourrait signifier une transition vers un modèle où l'État et le secteur privé, en plus du monde académique, sont pleinement impliqués. Dans cette optique, le rôle du ministère de l'Éducation doit être réformé en profondeur pour faire du manuel scolaire une priorité nationale. Un nouveau cadre légal est nécessaire pour plus de transparence et de sécurité juridique. Par ailleurs, le Conseil plaide pour que l’État affirme sa souveraineté sur la production des manuels officiels. Les programmes scolaires doivent être révisés avec la participation de toutes les parties prenantes. Les professeurs doivent être responsabilisés dans le choix des manuels. Il faut aussi réorienter l’allocation des ressources publiques. De même, est-il suggéré, les gaspillages doivent être réduits et les nouvelles technologies doivent être mises à contribution pour moderniser le manuel scolaire.
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