Sahara : Bourita détaille les rouages d’une victoire diplomatique conduite et supervisée par S.M. le Roi Mohammed VI
En obtenant l’adoption d’une résolution onusienne consacrant l’Initiative d’autonomie comme base unique des négociations, le Maroc a franchi une étape décisive dans le dossier du Sahara. Un aboutissement que le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, attribue, dans un long entretien diffusé le 1er novembre 2025 sur la chaîne publique 2M, à une stratégie patiente et méthodique, conduite depuis plus de deux décennies par S.M. le Roi Mohammed VI.
Invité de la chaîne 2M samedi 1er novembre, au lendemain du vote du Conseil de sécurité sur la résolution 2797, Nasser Bourita a livré un récit dense et précis des coulisses diplomatiques ayant permis ce résultat. Durant près d’une heure d’entretien, le chef de la diplomatie marocaine a insisté à plusieurs reprises sur le rôle central de S.M. le Roi Mohammed VI dans la conduite de ce dossier stratégique. «Nous vivons aujourd’hui le couronnement de vingt-six ans d’engagement personnel de Sa Majesté le Roi dans ce dossier», a affirmé d’emblée le ministre, soulignant que cette résolution n’était pas le fruit d’une conjoncture favorable, mais celui d’une action de long terme.
Revenant sur la période charnière de la fin des années 1990, il a rappelé que «dès 1998-1999, le Maroc est arrivé à la conclusion que le plan de règlement et le référendum avec l’indépendance comme option étaient impraticables», ce qui a conduit à la recherche d’une nouvelle voie. C’est ainsi qu’a émergé, à partir de 2004, l’architecture de ce qui deviendra l’Initiative d’autonomie, officiellement présentée à l’ONU en avril 2007. Selon M. Bourita, S.M. le Roi n’a jamais cessé, depuis cette date, d’œuvrer à en faire une référence reconnue sur la scène internationale. «Quand l’ONU n’était pas prête à en faire la base des discussions, Sa Majesté a travaillé, pays par pays, pour que l’autonomie devienne le référentiel des États», a-t-il expliqué, en rappelant que cette approche s’est renforcée après la reconnaissance américaine de 2020. Ce tournant diplomatique, loin d’être isolé, a été intégré dans une séquence stratégique plus large: «Ce que beaucoup pensaient lié à la seule présidence Trump, Sa Majesté l’a capitalisé auprès d’autres capitales», a-t-il indiqué, citant notamment l’Espagne, l’Allemagne, le Royaume-Uni ou encore la France. Le ministre a également mis en avant l’élargissement de cette dynamique au continent africain, depuis le retour du Maroc au sein de l’Union africaine en 2017, mais aussi au plan économique à travers des projets structurants dans les provinces du Sud, dont les effets ont consolidé le bien-fondé de l’initiative marocaine.
Une intervention Royale décisive dans les derniers jours
Le point culminant de cette séquence s’est joué dans les tout derniers jours avant le vote onusien. «Dans les cinq à six derniers jours, Sa Majesté le Roi est intervenu personnellement», a déclaré M. Bourita, précisant que le Maroc ne disposait alors que de six soutiens fermes, alors qu’un minimum de neuf voix était nécessaire pour faire adopter la résolution. Il a raconté comment, au fil des jours, cette majorité a été construite grâce à une implication directe du Souverain: «Nous étions à six, il fallait neuf. Puis dix, puis onze. C’est Sa Majesté qui a fait la différence.» Le ministre a souligné l’importance de ces démarches personnelles, qui ont permis de convaincre des partenaires encore indécis ou prudents. «S.M. le Roi a mené des contacts avec plusieurs dirigeants étrangers, au plus haut niveau, pour exposer la vision marocaine et clarifier les enjeux. C’est ce travail de conviction qui a permis d’élargir le soutien.»
La configuration actuelle du Conseil de sécurité ne facilitait pourtant pas l’exercice. «C’est l’une des compositions les plus complexes depuis longtemps», a relevé le ministre, évoquant notamment la présence de l’Algérie, partie prenante au différend, en tant que membre non permanent. «Il n’y avait pas de pays très proche du Maroc dans cette configuration. Nous avions face à nous des membres comme le Pakistan, qui raisonne selon sa propre équation régionale autour du Cachemire, ou des pays européens peu familiers du dossier», a-t-il ajouté. Face à cette équation difficile, Bourita a expliqué que le Souverain a opté pour une ligne de fermeté tranquille: «Le Souverain a dit clairement que la question du Sahara est le prisme à travers lequel le Maroc regarde le monde. Et les partenaires l’ont compris». En plus, «le Maroc d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier – il agit en partenaire souverain, sûr de sa force et de sa légitimité». Selon lui, c’est aussi cette clarté qui a permis d’éviter toute opposition frontale au sein du Conseil. «Aucun membre n’a voté contre. C’est un fait que l’archive retiendra.» Quant aux trois abstentions, Chine, Russie et Pakistan, elles ne sont pas interprétées comme des oppositions de fond. Pour Moscou et Pékin, selon le ministre, la question portait davantage sur la procédure que sur le contenu. «Leur réserve était liée au porteur de plume (les États-Unis), pas à la substance du texte. Et si la Russie s’est abstenue, elle l’a fait pour le Maroc, par égard à Sa Majesté», a affirmé M. Bourita, en rappelant le cadre stratégique bâti entre Rabat et Moscou depuis 2016.
Une diplomatie de la constance
Pour le chef de la diplomatie marocaine, cette séquence diplomatique est l'exemple d’une méthode que le Royaume applique depuis plusieurs années. Il la résume en une expression: «la diplomatie du sérieux». Selon lui, cette approche repose sur quatre éléments: une vision définie, un rythme maîtrisé, des étapes claires et des résultats concrets. «Le Maroc parle peu, mais agit. Il tient sa parole, avance étape par étape et construit une crédibilité», a-t-il expliqué. Cette ligne se veut aussi indépendante des blocs. «Nous n’avons jamais cherché l’alignement. Nous avons clarifié nos positions. Le Maroc est respecté parce qu’il ne joue pas la duplicité», a-t-il poursuivi. Le ministre a aussi souligné que le texte onusien entérinait désormais une lecture claire du processus: l’Initiative d’autonomie est la seule base de solution, et elle s’inscrit dans le cadre de la souveraineté marocaine. Un changement lexical majeur est à noter: le texte «ne se contente plus de saluer des efforts». Il affirme, reconnaît et enjoint, a-t-il fait valoir. Dans cette logique de clarté et d’anticipation, le Maroc prépare désormais une mise à jour de son initiative de 2007.
Nasser Bourita a confirmé que ce travail était déjà en cours, à l’initiative de S.M. le Roi. Il s’agit de transformer un cadre politique en plan opérationnel. La révision s’appuiera notamment sur la Constitution de 2011, la Charte de la régionalisation avancée et les deux grands modèles de développement (celui des provinces du Sud et celui du Royaume). L’objectif est de doter l’initiative d’un contenu institutionnel détaillé: institutions, compétences, moyens, temporalité.
Interrogé sur la cohabitation des notions d’autonomie et d’autodétermination dans le discours onusien, Bourita a tenu à clarifier: «L’autonomie est la forme la plus concrète de l’autodétermination. Elle repose sur des institutions locales élues, un accord librement consenti et un exercice quotidien des responsabilités.» Le ministre a conclu en insistant sur l’état d’esprit qui prévaut du côté marocain. Le vote à l’ONU n’est pas vu comme une victoire sur un adversaire, mais comme une avancée collective vers une solution. Il a repris les mots du Roi: «Le Maroc ne cherche ni vainqueur, ni vaincu. Il tend la main pour un dialogue direct, sans intermédiaire.»
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