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«Presque», les à-peu-près d’une vie de femme

Parmi les nouvelles parutions des Éditions de La Croisée des Chemins, «Presque», le roman de Khaoula Assebab Benomar. La cinéaste s’y essaie à la littérature pour décrypter la vie d’une femme qui prend son envol, littéralement.

«Presque», les à-peu-près d’une vie de femme

Qu’il soit dit d’emblée que le roman «Presque», de Khaoula Assebab Benomar, n’est pas un énième manifeste pour l’émancipation des femmes. Ou du moins pas tout à fait. Yto, son personnage principal, embarque dans un avion, avec pour seul bagage une valise jaune et les souvenirs d’une vie qu’elle à presque vécue. Et bien qu’elle ait choisi le 8 mars pour prendre la tangente, c’est surtout pour faire le deuil de ce qu’elle a perdu et de ce qu’elle n’a jamais eu.

Partir à la rencontre de soi

Selon de récentes recherches en sciences sociales, parler aux inconnus nous rend plus intelligents et autrement plus heureux. Ce n’est pas pour rien qu’Yto, qui a commencé par écouter indiscrètement les discussions médisantes de ses voisins, leur a déballé, sans filtre, le récit de sa propre vie. Car en parlant à ces messieurs, des détails intimes de sa vie, elle en a pris pleinement conscience ; assez pour en mesurer les dommages. Mais sachez-le, l’histoire d’Yto n’est ni plus dramatique, ni plus spectaculaire que celle de la majorité. Elle est tristement routinière, sans éclats, d’où sa vraie détresse, elle qui, à la mort de son homme et au départ de ses enfants, réalise qu’elle n’a pas vraiment vécu.

«Presque» est, sans vraiment le dire, le mouroir des possibles manqués ou alors le linceul pour ensevelir les rêves d’enfants.
Yto s’est racontée pour exister, pour regarder défiler le film de sa propre vie, prendre de l’altitude pour avoir une vue d’ensemble, puis se faire une raison pour atteindre cette résilience salutaire qui caractérise le genre féminin. Peu importe finalement la destination de ce voyage, Yto se rencontre elle-même. En prime, une présence bienveillante guette patiemment son retour.

Ces bourreaux qu’on élève

Yto aimait Isli, comme toute femme mariée par amour, se voue à son homme. Ce dernier n’était pas un monstre. Mais il n’en demeure pas moins dangereux. Malgré l’amour qu’elle éprouvait à son égard, Yto se devait d’admettre qu’il a été un vampire. Sans le faire exprès, Isli s’est nourri d’Yto, de ses jours, de ses espoirs et de son énergie vitale. Malmenée entre petits caprices et menues aventures, leur relation de couple ne laissait pas à Yto le temps de s’évaluer ou de s’individualiser. Et c’est là que «Presque» invoque la responsabilité des femmes dans leur sort.

Ne laissant pas de place à la victimisation, Yto admet tout : les concessions, le déni de soi, mais aussi la lâcheté, le peu d’ambition et l’indolence. S’il est vrai que la société est injuste envers les femmes et que bon nombre d’hommes en tirent des privilèges, l’écrasement n’est pas une fatalité. Bien au contraire, l’injustice peut être le combustible d’un départ en force.

«Presque» remet en question, non seulement le rapport inéquitable du couple, mais également l’éducation inégale des filles et des garçons. «Sois un homme» est l’injonction à la fois ridicule et dure qui terrorise les petits garçons, tout en dénigrant, sans le dire, les petites filles. D’autres commandements irritants reviennent à Yto qui finit par reconnaître sa part d’erreur, pour se réconcilier avec sa féminité très longtemps reléguée au second plan.

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