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Les pédiatres alertent sur la pénurie de médicaments : «Nos enfants sont en danger !»

La pénurie de certains médicaments vitaux n’est visiblement pas un phénomène marginal. Alors que des remèdes essentiels pour le traitement des maladies cardiaques et oncologiques se font rares, des médicaments pédiatriques s’ajoutent à la liste des médicaments introuvables. À telle enseigne que la Société marocaine de pédiatrie tire la sonnette d’alarme. Dans une lettre adressée au ministère de la Santé le 4 décembre, elle met en garde contre une pénurie qui «expose nos jeunes patients à des risques considérables, notamment des complications graves, des séquelles irréversibles, voire à la mortalité infantile».

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«C’est un problème récurrent. Nous nous retrouvons souvent face à des pathologies guérissables, mais le manque de médicamentent nécessaires pour les traiter peut entraîner des séquelles irréversibles et parfois être fatal». Le Dr Hassan Afilal, président de la Société marocaine de pédiatrie, ne mâche pas ses mots. Il résume ainsi la gravité d'une situation qui dure depuis plusieurs mois et devient critique : le manque des médicaments liés aux traitements et à la réanimation pédiatriques. Il s’agit à l’évidence d’un problème majeur qui pourrait mettre en péril la santé des enfants, notamment les plus vulnérables. L’inquiétude des professionnels et des parents est à son comble. Les témoignages que «Le Matin» a pu recueillir confirment l’urgence d’agir vite. D’ailleurs, la lettre envoyée, le 4 décembre, par de la Société marocaine de pédiatrie au ministre de la Santé, est on ne peut plus explicite.

Un manque alarmant aux conséquences dramatiques

Dans son courrier, Dr Afilal alerte sur la pénurie alarmante de certains médicaments essentiels au traitement des pathologies graves chez les enfants. «Depuis plusieurs mois, nous constatons une pénurie alarmante de certains médicaments qui sont pourtant indispensables à la prise en charge de pathologies graves chez l’enfant», est-il écrit dans la lettre dont «Le Matin» détient copie. On y précise aussi que ces médicaments, qui peuvent parfois représenter la seule option thérapeutique, sont souvent utilisés dans des situations critiques, notamment en réanimation pédiatrique. «Leur absence sur le marché expose nos jeunes patients à des risques considérables, notamment des complications graves, des séquelles irréversibles et, dans les cas les plus tragiques, une augmentation de la mortalité infantile», s’alarme M. Afilal dans sa lettre.

Face à cette situation, les professionnels de santé se retrouvent dans une position de plus en plus insoutenable. «Il est extrêmement difficile, voire parfois impossible, de prodiguer des soins de qualité lorsque les traitements de première nécessité font défaut. Les conséquences pour la santé publique, et en particulier pour nos enfants, sont potentiellement désastreuses si des mesures immédiates ne sont prises», souligne le professionnel qui appelle donc à une intervention immédiate des autorités : «Nous vous demandons respectueusement d’intervenir auprès des instances concernées afin de prioriser la disponibilité de ces médicaments sur le marché marocain et de prévenir toute aggravation de la situation».

Les solutions à envisager

Contacté par «Le Matin» pour en savoir plus sur ce problème, le président de la Société marocaine de pédiatrie ne cache pas son désarroi face aux explications fournies par les autorités sanitaires : «Des médicaments ont complètement disparu du marché marocain alors qu’ils sont indispensables. On nous explique que la pénurie est mondiale, pourtant on les trouve ailleurs», déplore-t-il. Visiblement donc, il y a un problème de gestion des approvisionnements. C’est pourquoi M. Afilal insiste sur la nécessité de mettre en place des stocks de sécurité, indispensables pour pallier les ruptures fréquentes. «Il faut des stocks de sécurité, notamment pour gérer les cas en réanimation», précise-t-il. Selon lui, ces stocks garantiront non seulement une meilleure gestion des médicaments vitaux, mais aussi une prise en charge continue des cas critiques.

Mais au-delà de la question de la gestion des stocks, le président de la Société marocaine de pédiatrie attire l’attention sur un autre facteur indirect qui pourrait expliquer la pénurie de certains médicaments. Selon lui, «la baisse du prix d’un médicament le rend non rentable pour les laboratoires, alors ils arrêtent de le commercialiser. C’est très bien de baisser les prix, mais si le prix à payer est la disparition d’un médicament du marché marocain, ce sont les malades qui en subissent les conséquences». Que faire alors ? Dr Afilal suggère de s’inspirer des expériences réussies des autres pays : «Il faut imaginer, comme dans certains pays, la création de la pharmacie centrale des hôpitaux. Une pharmacie où il y a tous les médicaments essentiels qui sont stockés pour les urgences», avance-t-il. Ce modèle permettrait, selon lui, de mieux gérer les stocks et de parer à toute éventualité.
En attendant que les autorités sanitaires réagissent, des vies sont sur le fil du rasoir. Des enfants sont peut-être en danger de mort, alors que leurs parents angoissés et les médecins assistent impuissants à leur détresse. Des mesures énergiques doivent être prises dans les plus brefs délais pour prendre à bras-le-corps ce problème, d’autant plus qu’outre la pédiatrie, la pénurie concerne d’autres spécialités médicales.

La lettre de la Société marocaine de pédiatrie comprend une liste non exhaustive des médicaments actuellement en pénurie, accompagnée d’une description de leurs usages et des conséquences de leur indisponibilité :

Sodium et potassium : ce sont des médicaments de base pour la réhydratation. Leur absence est extrêmement grave et peut directement conduire au décès dans certaines situations critiques.

Nicardipine : essentielle pour la gestion des hydratations sévères en réanimation, particulièrement en cas de crises hypertensives aiguës chez l’enfant.

Methylprednisolone (40 mg) et Solumedrol : indispensables dans la gestion des crises d’asthme sévères et des états de choc allergique, qui peuvent entraîner un risque vital immédiat si ces corticoïdes injectables ne sont pas disponibles.

Noradrénaline : un médicament vital en réanimation pour maintenir la tension artérielle des patients en choc. Sa pénurie peut être fatale dans les cas d’hypertension sévère.

Glucose 30% : essentiel pour la prise en charge des hypoglycémies sévères. Son absence peut entraîner des séquelles graves, voire un décès en cas de non traitement rapide.

Hydrocortisone : un corticoïde indispensable pour maintenir la tension artérielle, particulièrement en cas de déficits ou dans certaines situations critiques. Sa non-disponibilité peut conduire à des issues fatales.

Amikacine (Licacin) et Vancomycine (250 mg) : Ces antibiotiques sont essentiels dans la prise en charge des infections sévères en réanimation. Leur absence réduit considérablement les chances de survie des patients dans des situations critiques.

Un Alpha : un médicament crucial pour stabiliser la calcémie chez les enfants souffrant de troubles métaboliques.

Amoxiciline injectable : indispensable pour traiter des infections graves en urgences, notamment chez les enfants et les femmes enceintes.
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